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En préambule : l’éclat de lire

« Que jamais la voix de l’enfant en lui ne se taise, qu’elle tombe comme un don du ciel offrant aux mots desséchés l’éclat de rire, le sel de ses larmes, sa toute puissance sauvagerie ». (Des Forêts Louis-René, Ostinato, Mercure de France, p. 191).

Et je serais tentée d’ajouter l’éclat de lire aussi …

Cliché d’un nourrisson qui ne sait pas encore marcher mais sait saisir les livres et en tourner les pages… La gestuelle est déjà là, comme une forme maîtresse au sens où l’entendait Montaigne, un patron au dedans qui nous anime et nous expose. La saveur de lire est chevillée au corps alors qu’on ne sait pas encore déchiffrer avec la tête. Un attachant dé-lire. 

L’objet livre est lié aux espaces de belles solitudes de mon existence : la bibliothèque de prêts, celle de la ville, celle de l’école aussi, colorée par les fiches cartonnées, celle de la maison, brinquebalante contre le mur papier peint noir seventies. À quelque endroit toujours, cette posture de réceptivité identique, assise en tailleur, en contact avec le sol pour saisir le plus d’ouvrages d’une main alerte. Des heures entières à caresser du regard d’abord puis lire les quatrièmes de couverture ensuite. Seule, enchaînée à la liste alphabétique des auteurs, de A à Z. Et en savourant ces éclats d’histoires, cette sensation de devenir terriblement, presque sauvagement, présente. Là, dans ce contre espace, cette hétérotopie, comme la désigne joliment Michel Foucault, pour dire qu’elle est faite de trois fois rien, mais qu’elle existe quand même.

La quatrième de couverture pourrait aussi être considérée comme un contre espace. Étrange envers ou revers littéraire. La quatrième de couverture, entre le résumé et l’accroche. Souvent rédigée par d’autres personnes que l’auteur lui-même, ces personnes qu’on appelle les plumes de l’ombre et qui nous ménagent ainsi une place, à côté de l’auteur. J’ai toujours adoré ce moment de la promesse, cet avant de la lecture, où tout est encore possible. L’histoire n’est pas encore jouée. Les dés, juste, sont lancés. Un nom de personnage. Un décor peut-être. Une phrase citée, parfois. En levant la tête, le lecteur peut interpréter, projeter l’histoire telle qu’il la désire, l’imaginer en bref, en accéléré, alors qu’il n’a pas encore tourné une seule page. 

Les quatrièmes de couverture ont souvent habillé mes jours et continuent encore aujourd’hui leur office. Elles m’appellent en toute discrétion et m’épellent. Ce que je peux être demain. Elles me rendent à ce que je suis authentiquement et en toute autonomie : sujet lecteur.

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1 rue des Capucins
32700 Lectoure

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Photos : Claudine Cochet ©

Émotionde lired'écrire...

Lire, c'est notre nature d'homme, notre être profond, être lisant les traces des oiseaux dans le ciel, les vols, être lisant dans les étoiles, au bord des visages, être lisant qui cherche sa direction et restaure ainsi ses sens.

Emmanuelle Pavon Dufaure
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